Avec le printemps qui s’annonce, la mise à l’herbe des chevaux va réjouir autant les équidés pressés de retrouver l’herbe sur pied ainsi que les éleveurs dont le travail hivernal chronophage va s’alléger. Du moins c’est ce qui se passe avec une bonne organisation. En pâture, l’alimentation est, par définition, fournie mais l’eau n’est pas forcément disponible sur place. Comme c’est une problématique souvent traitée de façon un peu secondaire, son coût est très sous-estimé et les solutions pratiques alternatives ne sont pas envisagées. Faisons un petit point sur le coût de la corvée d’eau et sur l’ensemble des solutions d’abreuvement au pâturage.
Abeuvement des chevaux : Coût de la corvée d’eau
Lorsque la question de la corvée d’eau n’a pas encore été creusée, la solution la plus accessible semble en général être celle du bac de prairie que l’on alimente à la demande à l’aide d’un tracteur et d’une tonne à eau. En dehors de l’astreinte que cela représente, il est pertinent de chercher à évaluer le coût réel d’une telle pratique car il fait partie des critères de choix lors de la remise en question d’une telle pratique.
Les principaux facteurs qui influencent le coût de la corvée d’eau sont l’amortissement du matériel, le coût du carburant mais aussi le coût de la main d’œuvre.
Un exemple de coût
Pour un éleveur apportant de l’eau à un groupe de 15 chevaux adultes situés à 15 km du siège de l’exploitation, ces chevaux vont consommer environ 40 l/cheval/j soient 600 L pour la période de pâturage (1er avril au 1er novembre). S’il dispose d’une réserve importante dans les bacs (2500 L), l’éleveur peut réaliser un remplissage tous les 4 jours. Avec un tracteur 4 roues motrices et une tonne de 2500 L. Cela représente aux alentours de 50 corvées pour la saison.
Pour une corvée qui dure 1 h, chaque corvée représente :
- 8€20 de coût horaire du tracteur
- 4€30 de carburant
- 4€80 de coût horaire de la tonne à eau
- 15€00 de l’heure de main d’œuvre
Chaque corvée coûte 23€70. Les 50 corvées annuelles coûtent : 1185 €
Un tel constat amène inévitablement à rechercher systématiquement des solutions alternatives notamment lorsque les sites d’abreuvement des chevaux sont situés loin des écuries.
Les solutions d’abreuvement au pâturage
Les solutions d’abreuvement des chevaux au pâturage s’étudient en fonction :
- de la pâture à équiper (dimensions, éloignement),
- des besoins en eau du troupeau (nombre de chevaux, stade physiologique, attention aux consommations des poulinières en lactation)
- des spécificités techniques des différentes solutions,
- du niveau d’investissement envisagé
- des habitudes de travail dans l’établissement équestre
- des compétences techniques du personnel (installation, entretien)
Le Bac
Le bac d’abreuvement représente le système le plus simple, mais également le plus chronophage. En effet, il demande non seulement de la surveillance et du temps pour les corvées d’eau. Il nécessite aussi de l’entretien avec un nettoyage régulier des bacs particulièrement sensibles au développement d’algues. Cela provient du fait de « l’ensemencement » permanent réalisé par les chevaux qui viennent boire, ainsi que l’exposition aux UV. Ces derniers contribuent activement à la photosynthèse.
Pour gagner du temps, on peut, lorsque c’est possible, automatiser le remplissage des bacs avec différents procédés.
Pompes de prairie
La pompe de prairie est le système d’abreuvement le plus autonome puisqu’il permet au cheval de pomper lui-même l’eau de boisson en poussant contre le mécanisme. Dans une pâture proche d’un cours d’eau ou équipée d’un puits, c’est une solution particulièrement appréciable qui fait gagner du temps et libère des contraintes de pompes et de réserves en eau.
En poussant, le cheval actionne une membrane qui aspire l’eau depuis la crépine située à l’autre bout du tuyau. Un clapet anti retour évite que la pompe ne se désamorce. Lorsque le cheval relâche le mécanisme, l’eau se déverse dans le petit bac situé sous le poussoir. Comme le bas est légèrement incliné vers l’arrière, les animaux apprennent naturellement à pousser pour aller boire l’eau restante se trouvant au fond du bac. La pompe permet d’aspirer de l’eau jusqu’à 7 m de profondeur (ou 70 m en longueur) et peut être installée pour puiser dans un cours d’eau, une mare, ou un puits.
Son mécanisme souple permet à des poulains de race de selle de l’utiliser à partir de leurs 6 mois. Pour les juments suitées, le modèle élevage comprend un petit bol sur le côté qui permet au poulain de boire avec sa mère lorsque cette dernière actionne la pompe.
Pour que chacun puisse s’abreuver à un rythme satisfaisant, on compte une pompe pour 10 chevaux adultes ou pour 15 jeunes en croissance.
L’apprentissage de la pompe
L’apprentissage de l’utilisation de la pompe est rapide. Il convient évidemment d’amorcer la pompe et de remplir le bac à chaque visite au début. On observe assez rapidement que tous les chevaux ont compris. L’astuce pour en être certain est d’étaler du marqueur gras sur le poussoir de la pompe. Il suffit ensuite de constater les marques sur le nez des chevaux pour savoir s’ils utilisent la pompe.
Abreuvoir isotherme
L’abreuvoir isotherme est un bac thermiquement isolé et équipé d’une boule qui flotte à sa surface pour venir obturer l’orifice par lequel les chevaux boivent. En buvant, les chevaux renouvellent l’eau qui est donc maintenue à température constante. Les échanges thermiques avec l’extérieur sont limités par la boule. En hiver, l’abreuvoir reste fonctionnel jusqu’à -30°C si le débit assuré par la consommation des animaux est suffisant (20 équidés pour le modèle simple, 40 pour le modèle double). En été, l’obturation empêche les UV de pénétrer dans le réservoir, ce qui empêche le développement d’algues. C’est un gain de temps considérable pour la corvée de nettoyage.
Pour faciliter l’apprentissage, on peut faire baisser le niveau d’eau dans le bac, ce qui rend l’eau visible et facilite la poussée sur la boule. Le seul entretien est une vidange régulière pour évacuer les résidus alimentaires laissés par les chevaux lorsqu’ils boivent.
Abreuvoir antigel
L’abreuvoir antigel est constitué d’un bol positionné sur une buse isolante et équipé d’une résistance chauffante. Accompagné d’un thermostat et d’un transformateur, il chauffe le bol lorsque la température descend trop bas et prévient ainsi le risque de gel. C’est le système le plus fiable et qui demande le moins d’entretien puisqu’un coup d’éponge régulièrement suffit à le garder propre. On comptera un abreuvoir pour maximum 15 chevaux de manière à ce que tout le monde puisse boire régulièrement. Au-delà de cet effectif, on installe un second abreuvoir à 10 m du premier pour assurer un débit d’eau suffisant pour le troupeau.
Le mot de la fin sur la corvée d’eau et l’abreuvement des chevaux…
La qualité de l’eau est un facteur évident de santé des chevaux mais le débit et le fait que les chevaux y accèdent facilement permet de garantir aussi qu’ils boivent suffisamment. L’approche économique de cette question en doit pas être éludée car elle peut rapidement avoir des conséquences, que ce soit en frais vétérinaires, en temps de travail ou en coût d’utilisation. Enfin, on veillera au positionnement du point d’eau pour qu’il permette aux chevaux de boire suffisamment et en toute sécurité par rapport à l’environnement et par rapport à leurs congénères.
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