La création d’une carrière équestre est bien plus qu’un simple aménagement de terrain : c’est l’édification d’un espace dédié à la pratique et à l’épanouissement de l’équitation. Pour mener à bien ce projet, une multitude de considérations doivent être prises en compte, allant de la sélection du bon prestataire à la planification minutieuse de l’infrastructure. Dans cet article, nous explorerons en détail neuf points essentiels à considérer pour garantir le succès de votre projet de carrière équestre.

1. Analyse des besoins et choix du prestataire.

  • Évaluer les disciplines pratiquées et l’intensité d’utilisation.

A la FFE, on dénombre près de 30 disciplines équestres différentes. Cela signifie que chaque sol ne peut pas répondre parfaitement aux exigences de toutes les disciplines. En se spécialisant dans une discipline spécifique, le sol devient plus technique mais moins polyvalent. Par conséquent, la première question cruciale dans tout projet de carrière équestre concerne l’utilisation prévue :

– Quelles disciplines seront pratiquées ?
– Y aura-t-il des compétitions organisées dans la carrière ?
– Quelle sera l’intensité d’utilisation (nombre d’heures cheval par jour ou par semaine) ?
– Quel niveau technique est attendu ?

  • Orienter son choix vers un prestataire spécialisé selon le niveau technique requis.

Pour une carrière équestre de haut niveau technique, il est recommandé de s’adresser à une entreprise spécialisée disposant de solides références.
Pour une utilisation plus tournée vers l’initiation ou le loisir, on pourra s’adresser à une entreprise locale plus généraliste, en s’appuyant sur des documents techniques fiables, à condition que l’intensité d’utilisation ne soit pas trop intense.

sol équestre

2. Dimensionnement et forme de la carrière :

  • Définir la taille optimale en fonction des besoins, évitant le gaspillage d’espace.

Bien définir le dimensionnement de la carrière et sa forme permet d’optimiser l’investissement. Une grande carrière coûte nécessairement plus cher, mais n’est pas forcément plus utile. Par exemple, pour l’initiation à poney, les moniteurs apprécient une petite carrière de 15×25 pour rester à proximité des poneys et des enfants.

L’idée selon laquelle on peut toujours diviser une grande carrière en espaces plus petits et l’utiliser simultanément pour plusieurs reprises omet le souci que posent les interactions entre les chevaux de part et d’autre de la séparation. Là encore, le choix de plusieurs espaces séparés est plus pertinent.

  • Adapter la forme pour une utilisation adéquate, privilégiant les espaces rectangulaires pour les petites dimensions.

L’équitation fait partie des sports pouvant utiliser des terrains de formes originales et variées pour certaines disciplines (dont le CSO). Il est donc toujours intéressant de créer des espaces plus paysagés sortant des classiques carrières rectangulaires. Cela permet entre autres d’implanter des arroseurs sur des massifs intérieurs à l’aire d’évolution. Attention toutefois à ne pas abuser des formes arrondies qui limitent l’utilisation de l’espace et qui rendent les carrières plus difficiles à monter pour les cavaliers. À ne réserver qu’aux grands terrains de compétition. Pour les carrières de petite dimension, la forme qui optimise l’utilisation est le rectangle.

En dehors des carrières équestres spécifiquement dédiées à la discipline du dressage, on peut avantageusement arrondir légèrement les coins. Cela résout le problème du passage de la herse jusque dans le coin et prévient la formation d’un « triangle d’herbe » à chacun des coins de la carrière d’équitation.

Carrière idée de forme

3. Prise en compte de l’environnement :

  • Analyser la topographie et la nature du sol pour éviter les problèmes d’humidité.

Comme tout projet architectural ou d’infrastructure, une carrière d’équitation s’inscrit dans son environnement et en tenir compte permet de limiter certains écueils. Les premiers facteurs environnementaux à prendre en compte pour élaborer le projet sont la topographie et la nature du sol. On évitera les zones humides et les points bas sujets à la stagnation d’eau. Pour tous les projets sur des terrains difficiles ou sujets à caution, une petite étude géotechnique réalisée par un laboratoire routier pour définir le profil de fondation adéquat fournissant les 25 à 30 MPa de portance recommandés est très vite amortie par la rationalisation des quantités de matériaux de fondation à fournir. Il permet également de sécuriser la réussite de ce point clé du projet.

  • Anticiper les impacts des éléments extérieurs, comme les feuilles d’arbres, sur la qualité du sol.

La présence d’arbres à proximité de la carrière équestre apporte de l’ombre et du confort en été, mais apporte aussi des feuilles en automne. Ces dernières vont « polluer » le sable et dégrader, à terme, la qualité du sol. On peut prévenir cela en positionnant en automne un filet fin sur la carrière d’équitation en dehors des horaires d’utilisation pour récolter les feuilles tombées au sol.

Carrière environnement

4. Infrastructure et drainage

  • Planifier l’évacuation efficace de l’eau dès la conception.

Ce point constitue un élément crucial et souvent négligé dans de nombreux projets, souvent à l’origine de difficultés. La première question primordiale à aborder lors de la planification d’une carrière équestre est sans conteste : « Comment évacuer l’eau ? » En fonction de la taille et de l’usage prévu de la carrière, il est essentiel de mettre en place des infrastructures de drainage adaptées ou des pentes soigneusement calculées et construites.

  • Assurer une cohérence entre le drainage et la perméabilité du sol pour éviter les problèmes de stagnation d’eau.

Il est crucial de souligner que l’harmonisation entre le système d’évacuation des eaux et la perméabilité de la couche de sol est indispensable. Une couche de sol perméable doit nécessairement être accompagnée d’une infrastructure de drainage adéquate. De même, une fondation conçue pour évacuer l’eau par pente ne sera efficace qu’avec l’utilisation d’un microsable très fin adapté à cette technique. Il est courant de penser qu’évacuer l’eau par la pente suffit dans une carrière construite avec un sable standard. Cependant, dans ce cas, l’évacuation complète peut prendre plusieurs jours.

Pour une structure privée, une mauvaise évacuation des eaux dans une carrière équestre peut être regrettable, mais acceptable. En revanche, pour une structure professionnelle, cela est tout simplement inacceptable. Il est donc primordial de s’appuyer sur l’expertise d’une entreprise spécialisée ou de faire appel à un maître d’œuvre expérimenté.

sable équestre

5. Choix de la couche de travail

  • Sélectionner un sable adapté, avec un pourcentage élevé de silice pour une durabilité optimale

Si ces dernières années ont vu l’apparition de sols en copeaux de feutre, les couches de travail sont le plus souvent réalisées en sable. Le choix de ce dernier est toujours une étape clé d’autant qu’elle doit être en cohérence avec l’infrastructure et la technique de drainage choisie. De ce choix va également découler la texture du sol équestre et sa consommation en eau bien que ces deux paramètres puissent, dans une certaine mesure, être améliorés par un fibrage du sable. Les points clé de choix du sable sont les suivants :

–  % de silice le plus élevé possible (toujours > 90 %) ce paramètre conditionne l’usure du sable.
– La granulométrie: idéalement inférieure à 0/1, ne jamais aller au-delà de 0/2 même pour des carrières de loisirs privées.
– L’angulosité des grains. Un matériau concassé ou à grains anguleux va rapidement se compacter et devenir dur. Un sable roulé sera souple, voire profond, si la granulométrie est trop grossière et si le % de fines (particules les plus fines) est trop faible.

  • Gérer l’interface entre la couche de fondation et la couche de travail pour éviter les mélanges indésirables.

Le point clé lors de la mise en œuvre de la couche de travail est de gérer l’interface entre la couche de fondation, composée de matériaux plus grossiers, et la couche de travail en sable très fin. Sans anticipation, ces deux couches se mélangent sous le poinçonnement des pieds des chevaux, entraînant l’incorporation de cailloux dans la couche de travail.

Pour éviter ce problème, on évite d’installer un géotextile entre ces deux couches, contrairement à certaines recommandations d’entreprises de TP inexpérimentées en sols équestres. Idéalement, on privilégie l’utilisation de dalles alvéolaires qui empêchent le mélange des couches. Lorsque le budget ne le permet pas, on peut recourir à une couche d’aveuglement ou couche de fermeture de 5 cm, généralement composée d’un matériau de type 0/4, dont la granulométrie intermédiaire entre celle de la fondation et celle de la couche de travail évite leur mélange.

6. Lice et bordure

  • Installer une lice sécurisée, conforme aux normes de sécurité, pour délimiter la carrière.

La lice de carrière équestre est d’abord un élément de sécurité de la carrière. Elle doit respecter les recommandations de sécurité émises par l’IFCE et être adaptée en hauteur au gabarit des équidés et aux pratiques. Sa pose réclame plus de soin qu’une clôture de parc, car les têtes des poteaux doivent être parfaitement alignées sous peine de rendre la réalisation inesthétique. Les lices en rubans sont à proscrire, car elles n’offrent pas le niveau de sécurité suffisant pour le public, les cavaliers et les chevaux.

  • Protéger la couche de travail avec une planche de retenue pour prévenir la pollution et l’érosion.

Trop souvent négligée, la planche de retenue de sable positionnée en pied de poteaux de lices est indispensable pour protéger le sable de couche de travail de la pollution par la terre végétale environnante, retenir sur la piste le sable projeté vers l’extérieur par les pieds des chevaux et pour prévenir son érosion lors de fortes averses. Choisir un modèle classe IV certifié permet de sécuriser sa durée de vie sachant qu’elle est soumise à l’humidité du sol, aux impacts de pieds des chevaux et à ceux de la herse. Elle fait en réalité toute la différence entre une carrière équestre dont la piste est propre et fiable d’une dont la piste se dégrade et est impossible à entretenir correctement.

Lice de carrière conforme
Portail de carrière

7. Accès et Portails

  • Prévoir des accès adaptés aux cavaliers et aux engins, avec des portails manipulables facilement.

En phase de planification, l’un des aspects cruciaux est de prévoir des accès adaptés aux cavaliers et aux engins, dotés de portails manipulables facilement. Il est recommandé d’anticiper différentes largeurs pour les accès, notamment 1m20 ou 2m10 pour les cavaliers et un minimum de 3m pour les engins, selon la largeur de la herse. Ne pas oublier de prévoir un portillon pour permettre aux officiels d’accéder à la piste lors des remises des prix, sachant que leur expérience et leur sagesse ne sont souvent pas accompagnées de la souplesse nécessaire pour se glisser entre les lices de la carrière d’équitation.

Il est impératif de vérifier que les portails sont non seulement présents, pour éviter les accidents potentiels liés à des carrières restant ouvertes pendant leur utilisation par les cavaliers, mais aussi qu’ils sont facilement manipulables par tous les utilisateurs, y compris les enfants et les personnes de gabarit léger. Dans cette optique, il est préférable de privilégier des entrées plus étroites avec des portails plus légers pour un usage courant, garantissant ainsi une manipulation aisée.

  • Veiller à la sécurité en choisissant des portails en continuité avec la lice de la carrière.

Enfin, il convient d’utiliser des portails dont la lice supérieure est en continuité avec celle de la carrière équestre, afin d’éviter la formation de profils contondants en cas de chute à cet endroit stratégique, garantissant ainsi la sécurité des cavaliers et des chevaux.

8. Arrosage

  • Assurer un arrosage homogène pour maintenir la texture du sol et garantir la sécurité des chevaux.

En effet, la texture du sol de la carrière équestre dépend de l’interaction entre le sable et l’eau. L’arrosage ne se résume pas uniquement à coller la poussière ; il influe directement sur la texture du sol, ce qui impacte la sécurité et la santé ostéo-articulaire des chevaux. Il est donc essentiel que l’arrosage couvre l’intégralité du sol de manière uniforme, offrant ainsi une surface régulière sous les pieds des chevaux. La subirrigation est la solution idéale, offrant une distribution homogène de l’eau, même si son coût d’installation peut être élevé.

  • Opter pour des solutions d’arrosage adaptées à l’utilisation et au budget disponible.

La plupart des professionnels équipent leurs carrières d’un système d’arrosage aérien intégré. Les arroseurs, positionnés en périphérie, doivent idéalement couvrir au moins les 2/3 de la largeur de la carrière pour obtenir un résultat satisfaisant. L’idéal est un système d’arrosage en « pied à pied », où chaque arroseur irrigue son voisin, assurant ainsi une répartition optimale de l’eau sur la surface de la carrière.

Pour les carrières à utilisation moins intensive, le choix d’un arroseur automoteur branché sur un tuyau peut être une solution économique et efficace. Cependant, cela nécessite un temps d’indisponibilité plus long pour l’arrosage de la carrière.

En revanche, l’arrosage à la tonne à eau ou au RIA (lance à incendie) doit être réservé aux cas exceptionnels en raison de la main-d’œuvre requise pour leur utilisation.

Solution arrosage
Amélioration sol équestre

9. L’entretien

  • Considérer l’entretien dès la conception de la carrière pour garantir sa durabilité.

La qualité initiale de la carrière dépend en grande partie de la qualité de sa réalisation. Cependant, au fil des années, l’état de la carrière équestre repose principalement sur l’entretien régulier qu’elle reçoit. Il s’agit donc d’un aspect essentiel à prendre en compte dès sa création. L’outil d’entretien doit être adapté au type de sol (sable pur ou fibré), aux dimensions de la carrière et à l’équipement disponible pour l’entretien (tracteur, quad, etc.).

  • Sensibiliser les utilisateurs à l’importance de maintenir la propreté de la carrière et investir dans un entretien régulier.

Cela implique notamment de conscientiser les cavaliers à ramasser les crottins de leurs chevaux, ce qui contribue à limiter la dégradation rapide du sable de la couche de travail. De plus, confier l’entretien à une personne compétente et motivée, et lui fournir les ressources nécessaires en termes de temps et de matériel, constitue la meilleure approche pour garantir que le sol de la carrière reste dans un état optimal. Un sol bien entretenu permet non seulement de satisfaire les utilisateurs, mais également de permettre aux chevaux d’exprimer pleinement leur potentiel.

La carrière d’équitation est indéniablement l’un des équipements les plus répandus dans tous les établissements équestres. Toutefois, il est intéressant de noter qu’il n’existe aucune norme standardisée pour sa réalisation, ce qui offre une certaine flexibilité et adaptabilité aux besoins spécifiques de chaque projet. Cette absence de norme peut toutefois être source d’incertitude pour les porteurs de projets, qui peuvent se sentir démunis lorsqu’il s’agit de concrétiser leur vision.

Dans cette optique, s’il persiste des zones d’ombres malgré les conseils prodigués, il est essentiel de ne pas hésiter à faire appel à un spécialiste. En consultant un expert du domaine, les porteurs de projets peuvent bénéficier d’un accompagnement personnalisé et de conseils avisés pour garantir la meilleure qualité de réalisation de leur carrière équestre. En s’associant avec un professionnel compétent, vous pouvez ainsi concrétiser votre projet de manière optimale, en tenant compte des meilleures pratiques et des spécificités de votre contexte.