L’intégration d’un nouveau cheval peut s’avérer délicate et demande parfois du temps avant que le groupe ne se stabilise.
Comment cela se déroule-t-il ? Combien de temps est nécessaire pour franchir cette étape ?
L’importance des relations stables
Lorsque des chevaux vivent en groupe, ils forment et entretiennent des relations sociales que l’on classe en deux catégories : les relations de dominance et celles d’affinités, équivalentes à de l’amitié. On considère qu’un groupe est stable lorsque ces relations sont établies entre les congénères et ne changent plus. Dans la pratique, on peut s’en apercevoir par le très faible nombre d’agressions réelles et les liens d’amitiés qui existent entre certains chevaux.
Que se passe-t-il quand on change la composition du groupe ?
Si un membre est retiré du groupe, ou qu’à l’inverse un membre est ajouté, tout le réseau social est déstabilisé. Tout d’abord, la hiérarchie doit se restructurer. En règle général, celle-ci est linéaire, c’est-à-dire qu’un cheval A est dominant sur un cheval B lui-même dominant sur un cheval C. Si l’on ajoute un nouveau cheval, il faudra qu’il trouve une place dans cette chaîne en établissant une relation de dominance avec chacun des chevaux A, B et C. Cela passe bien souvent par une phase de conflit.
Une fois ces relations stabilisées, la hiérarchie se manifeste majoritairement par des menaces et des évitements sans affrontement. D’autre part, les relations d’amitiés peuvent elles aussi changer. Deux chevaux du groupe, habituellement très proches, s’éloigneront peut-être si l’un d’eux se lie d’amitié avec le nouveau venu. Ce rapprochement pourrait amener à un isolement du cheval ne faisant pas partie de la paire ou au contraire à de nouvelles amitiés avec d’autres membres du groupe. L’arrivée d’un nouveau va donc bouleverser bon nombre de relations déjà existantes.
Des réactions très diverses à l’issue de la rencontre
L’arrivée d’un nouveau cheval peut provoquer des réactions de nature très différente de la part des anciens membres du groupe. Dans la plupart des cas, la rencontre commence par une phase d’exploration mutuelle où les chevaux se flairent les naseaux. L’inspection peut ensuite s’étendre à d’autres parties du corps de l’autre. Par la suite, les interactions peuvent prendre une multitude de formes allant du conflit direct au désintérêt total. Les rapports peuvent parfois être impressionnants et il est important de bien surveiller les premières heures et premiers jours de cohabitation.
La fréquence et l’intensité des conflits devraient très fortement diminuer au cours de la première semaine. Il arrive parfois que le nouvel arrivant soit rejeté par un ou plusieurs membres du groupe. Ces derniers vont alors le chasser voire l’attaquer/s’en prendre à lui lorsqu’il se trouvera à proximité des anciens. Petit à petit, la distance de tolérance va diminuer jusqu’à ce que le cheval soit accepté à quelques mètres des autres. Ce processus peut parfois prendre plusieurs semaines voire des mois. Tout comme la question de la taille du groupe, il n’est pas possible de donner une durée exacte à l’intégration d’un nouveau cheval dans un groupe car de nombreux paramètres sont à prendre en compte et varient selon les cas de figure (nombre de chevaux à intégrer, dynamique et stabilité du groupe existant, tempéraments, expériences passées, espace et ressources disponibles etc…).
Surveillance et patience pour une intégration réussie
Plutôt qu’une durée précise à attendre, le point le plus important est avant tout l’observation du groupe. Il faut être attentif au comportement de chacun et aux signes de changements au fur et à mesure des jours. Si le nouveau cheval était rejeté par le groupe et que vous l’observez un jour légèrement plus proche d’un autre membre, c’est bon signe. Cela signifie que l’intégration est en train de se faire petit à petit. L’important est d’observer une amélioration dans la tolérance des chevaux vis-à-vis du nouveau au cours des jours voire des semaines. Et cela, même si les changements paraissent légers et lents.
Quand faut-il agir ?
L’arrivée d’un nouveau venu est une source de stress temporaire pour lui mais aussi pour les chevaux déjà présents. En effet, ils vont devoir réaffirmer leur place au sein du groupe. C’est pourquoi il faut veiller à ce que chaque cheval ait accès aux différentes ressources (alimentation, point d’eau et de repos) sans qu’un congénère n’en bloque l’accès tout au long de la période d’intégration. Par ailleurs, si les conflits sont trop violents (risquant de provoquer plus que des blessures superficielles) ou qu’aucune amélioration, même subtile, n’est constatée au cours du temps, il faudra repenser la composition du groupe en séparant les chevaux qui ne s’entendent vraiment pas.
À propos de l’auteur : Anna Flamand
Anna Flamand est éthologue ingénieure d’étude en éthologie depuis plusieurs années au CNRS de Strasbourg dans l’équipe de NeuroEthologie et Cognition Sociale. Elle mène des projets portant essentiellement sur le bien-être social des chevaux. Après avoir dispensé des cours sur le comportement pendant une année à Avenches, elle se consacre, avec HORSE STOP®, à un nouveau projet de recherche portant sur l’intégration de la socialité du cheval dans les infrastructures équestres.